L’église Saint-Jean à la Porte latine

Un édifice datant du médiéval aux multiples visages.

Mon amour de Saint-Jean

L’histoire de La Valette-du-Var remonte à l’Antiquité tardive, comme en attestent les fragments de céramique découverts lors des fouilles archéologiques réalisées sur le site de l’église en 2021. Premiers indices jusqu’alors jamais identifiés d’une occupation du centre-ville entre les Ve et VIIe siècles, cette découverte confirme l’ancrage de l’église Saint-Jean à la Porte latine dans l’identité de la ville. L’église s’est agrandie au fil des siècles ; des travaux d’envergure ont ainsi été réalisés au XVIIe siècle, dont notamment la construction du portail maçonné, la réalisation de la Porte latine, par un élève de Pierre Puget, et celle de l’arc triomphal séparant les deux nefs.

Au cours des dernières décennies et aujourd’hui de nouveau, l’église Saint-Jean à la Porte latine a fait l’objet de campagnes de restauration dont voici le rappel passionnant :

Mai 2000, arrivée des Restaurateurs Sans Frontières

L’église Saint-Jean à la Porte latine de La Valette-du-Var a fait partie des cinq édifices religieux sélectionnés dans le monde par l’association Restaurateurs Sans Frontières – que dirigeait Robert Bougrain-Dubourg – dans le cadre d’une campagne internationale soutenue par la Mission de l’an 2000 et le Conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Cet intérêt s’est appuyé sur la découverte de décors peints (datés des 17ème et 18ème siècle) sous les couches d’enduit successives qui couvraient les murs de l’église. Cet intérêt a été confirmé par une série de piquetages en 1999.

C’est la qualité de ces peintures qui a amené Robert Bougrain-Dubourg à entreprendre la restauration de l’église valettoise.

Été 2001, la Vierge au dragon

Lors de la deuxième campagne, l’équipe de restauration a découvert les traces de la Vierge au dragon peinte sur l’arc triomphal de l’église. Les plaques d’enduit ont été déposées avant de fixer le décor dans sa globalité et dans ses teintes originelles.

L’intérêt de la représentation résulte de la position même de la Vierge, terrassant le Dragon et affichant les trois sentences suivantes : ego sum via, ego sum veritas, ego sum vita (je suis la vie, je suis la voie et je suis la vérité). Il s’agit d’une attitude peu commune dans la peinture sacrée du XVII° siècle qui figure habituellement la mère du Christ sous les traits d’une madone attendrie.

Été 2004, deuxième campagne

Cette campagne est intervenue après les précédentes qui ont permis de remettre au jour les retables latéraux, après enlèvement des couches de badigeon et rebouchage des trous de piquetage.

Encadrées par Nathalie Le Van, une spécialiste des peintures murales, les élèves de l’école d’art d’Avignon se sont succédés sur les échafaudages et ont travaillé dans les règles de l’art. Des règles draconiennes puisqu’elles autorisent uniquement l’emploi de peintures réversibles (des aquarelles en l’occurrence), de façon à respecter en premier lieu l’historicité et l’empreinte originelle de l’œuvre. L’équipe a d’abord engagé une série de relevés qui délimitent les opérations. Puis, l’étape suivante vise à consolider le support, à redonner cohérence et homogénéité aux surfaces par injections de résine.

Le mur est imprégné, depuis la couche apparente jusqu’à la plus profonde. Une seconde étape consiste dans la restauration proprement dite. Les éléments apparents de la peinture, sa conception en trompe-l’œil, sa disposition symétrique, permettent de déduire les parties effacées – en prenant soin de ne rien « inventer » qui n’aurait été pensé par le peintre en son temps. Le dessin – ses formes et couleurs – est ensuite repris suivant un « modèle » minutieusement préparé.

Septembre 2004, le retour des tableaux

Après les murs latéraux (consolidation des supports à l’aide de résine injectée, puis dégagement et recomposition à l’identique des grands retables), la mise au jour de l’arc triomphal, ce sont les grandes toiles de l’église qui ont été remises en lumière. Les responsables de Restaurateurs Sans Frontières ont explicité les techniques employées pour retrouver la beauté originelle de la Déploration du Christ ou de La présentation de Marie au temple : toile de châssis à nettoyer, à doubler parfois, et pas moins de trois vernis à éliminer avant de ressusciter la couleur initiale et combler les zones lacunaires.

Été 2005, la renaissance s’est poursuivie

La renaissance de l’édifice se poursuit avec une dizaine d’étudiants de l’École d’art d’Avignon qui ont concentré leurs efforts sur le plus grand retable, à gauche de l’église. Également objets d’attention, les deux piliers de l’arc triomphal ont retrouvé une coloration apte à exhausser les deux statues qu’ils portaient à l’origine.

Septembre 2005, un été très peinture

Le travail s’est fixé sur le latéral gauche de l’église Saint-Jean. Ce sont les élèves des Écoles de Condé (Paris) qui ont été à l’œuvre cette fois. L’équipe a conduit le « réveil » de l’aile gauche dans l’esprit du travail effectué précédemment sur l’arc triomphal ; en respectant scrupuleusement le support et les peintures originelles.

Il a fallu reboucher un à un, à l’aide de mastic, les centaines de trous de fixation provoqués par les enduits successifs. Puis retrouver les teintes d’origine par juxtaposition des tons jusqu’à la « vibration » correspondant à la couleur première. Travail précis qui devait préserver les deux époques du décor : celle plus visible du XVIIIème  – avec ses colonnes ioniques et son entablement – laissait deviner l’empreinte seconde d’un fronton, sans doute attribué au siècle précédent. La préparation de la couleur – sur une base acrylique – est un travail patient, particulièrement quand il s’agit d’appliquer la « couche de fond » sur chaque raccord de mastic.

Été 2007, le mur de l’entrée

En sept ans, murs latéraux et arc triomphal ont retrouvé un éclat premier daté des 17ème et 18ème siècle. Dernière phase en date, la « révélation » du mur de fond à droite de l’entrée, a été commentée par Pascale Accoyer, conservateur restaurateur d’œuvres peintes, qui l’a conduite durant l’été 2007. Conservateur restaurateur d’œuvres peintes, la jeune femme faisait partie du groupe d’étudiants qui pratiquèrent, en 1999, les premiers sondages destinés à témoigner de son intérêt.

La campagne 2009

Au printemps, l’effort a porté sur la porte d’entrée de l’édifice, recouverte par de multiples couches de lasures qui cachaient la qualité de sa facture. Cette porte est attribuée à l’atelier de Pierre Puget, peintre et sculpteur qui laissa traces de son art de Gènes à Toulon au cours du 17ème siècle.

La restauration de ce magnifique portail a été confiée à Frédéric Bertrand, ébéniste d’art.

À l’intérieur,  les zones lacunaires des pieds de l’arc triomphal ont été récréées en trompe-l’œil afin d’éliminer la sensation d’inachevé laissée par les marques blanches. D’autres zones non peintes – à l’emplacement d’anciens tableaux et autels latéraux – ont été reprises dans la continuité des teintes limitrophes obtenues par la restauration en cours.

Dans le même temps, l’équipe conduite par Laurence Durand, responsable de Restaurateurs sans frontières, est intervenue sur le bénitier situé à gauche de l’entrée, bénitier dont le cerclage présentait une oxydation menaçante pour la vasque.

Février 2023 : nouvelle campagne de restauration avec la Fondation du patrimoine.

Tout comme les plus hautes montagnes finissent, avec le temps, érodées par les vents et transformées en plaines, l’église Saint-Jean à la Porte latine a subi l’usure des siècles et requiert une restauration à la hauteur de sa qualité patrimoniale et sa particularité historique, laquelle réside dans la juxtaposition de ses différentes époques de construction. Un partenariat est alors signé entre la Ville et la Fondation du patrimoine, avec la mise en place d’une campagne de mécénat populaire, destiné à fédérer les amateurs de patrimoine autour de cette campagne ambitieuse.

Celle-ci prévoit le traitement des murs et des voûtes de la nef et du chœur, la restauration des vitraux et des peintures de l’arc triomphal, la réfection générale des sols et également la restauration de la Porte latine.

Été 2023 : début des travaux d’étanchéité sur le toit-terrasse.

Durant l’été 2023, la Ville a mis l’édifice hors d’eau  et a fait procéder à la reprise de l’étanchéité du toit-terrasse en périphérie sur ses quatre sens, avec remplacement des boites à eau, descentes comprises, situées sur la façade Est, traitement des façades Nord, Sud et Est, ainsi que la réfection de la façade de la sacristie.


haut de page